
C’est aujourd’hui dimanche, journée d’automne, qu’Azzedine Alaïa a présenté sa collection Eté 2017, chez lui, sous la verrière qui abrite aussi les expositions qu’il organise dans le cadre de sa galerie.
Le couturier est un être à part dans le monde de la mode. Affranchi des rituels et des institutions, il défile quand il le souhaite. Celui que son équipe appelle « Monsieur Alaïa » a conquis sa liberté dans un univers très codifié. Il n’a jamais cédé au rythme des tendances, préférant interroger, au fil des années, les « transformations silencieuses » de nos modes de vie et donc de nos vêtements.
Passionné d’art contemporain et de design (Julian Schnabel, Marc Newson, Jean Prouvé), se sentant proche de l’architecture (Jean Nouvel, Claude Parent), fasciné par la danse (il a notamment créé en 2013 les costumes du ballet, Les Nuits, du chorégraphe Angelin Preljocaj), Azzedine Alaïa traverse les disciplines. C’est au 18 Rue de la Verrerie, dans le Marais, que se trouve la résidence du couturier mais aussi son hôtel, sa galerie, sa boutique et ses ateliers, un lieu convivial où se retrouve sa communauté créative.
Les mannequins, bandeaux élastiques enroulés sur la tête façon turban, défilent sans autre accessoire. Très droits, sans maquillage, la tête parfois tendue vers l’arrière, ils semblent vouloir s’effacer devant le vêtement. Le vêtement, c’est lui qui tient la vedette. Chez Alaïa, tout est question de mouvement, de construction à même le corps et d’équilibre. Ses créations décident d’une allure, elles ont un impact immédiat sur la silhouette. Ceci est particulièrement visible et marquant sur les pièces noires du créateur. Une robe au large col cheminée rigidifié rend immanquablement le port de tête altier, une combinaison aux jambes XXL, ultra fluides, volent à chaque pas du mannequin faisant tournoyer sa silhouette. Une robe longue au col montant, immobile, plaquée à même le corps du mannequin pourrait être considérée comme anodine si ses manches travaillées comme les manches d’une chemise, un peu bouffantes, resserrées par une boutonnière aux poignets, légèrement arrondies, ne bouleversaient pas l’équilibre de la silhouette.
Il y a de la maille bien sûr, même si l’on se prend à regarder les modèles plusieurs fois avant d’en être convaincu tant la coupe et le tombé des pièces laissent présager d’un travail du flou. Des jupes corolles, des jupes longues façon jupon mais aussi des robes droites et des mini-jupes esprit sixties aux imprimés géométriques : des bandes rouges verticales croisent des lignes noires horizontales sur fond blanc ou inversement, des cercles concentriques ponctuent les créations. Et, des pétales de fleurs, des tops cropped, des jupes faites de lianes de maille.
Chez Alaïa, quand on assiste à un défilé ou lorsqu’on visite sa galerie, on vit un moment. On a conscience que quelque chose est en train de se passer, quelque chose de beau, de fort, de différent aussi, quelque chose dont on sait que l’on se souviendra. Chez le couturier, l’humain est au cœur de la pensée et cela passe par un refus de la compromission et des règles établies.